Le mariage chrétien
à l’heure
d’Amoris laetitia
Les repères du Rituel

AVANT L'ENGAGEMENT, LE DIALOGUE INITIAL

Par le dialogue initial, les futurs mariés sont invités à prendre – devant la communauté – un engagement l’un vis-à-vis de l’autre, dans une perspective spirituelle. En répondant aux questions du Rituel, ils sont appelés à assumer leur vocation baptismale et conjugale tout en notant que les formules sont respectueuses du cheminement de chacun (et intègrent le cas des personnes non baptisées : cf. célébration du mariage entre une partie catholique et une partie catéchumène ou non chrétienne, détaillée dans la Fiche 9).

Les « quatre piliers » du mariage

Ils sont caractéristiques de l’amour de Dieu. En s’engageant à vivre ce qui est communément appelé les « quatre piliers » à savoir liberté, fidélité, indissolubilité et fécondité, les futurs époux reconnaissent les propriétés du mariage chrétien comme valeurs fondatrices de leur couple. Il s’agit d’une promesse éthique et spirituelle à renouveler chaque jour.

La liberté va avec la fidélité et dans Amoris Laetitia, le pape rappelle que choisir le mariage procède d’un discernement vocationnel et « exprime la décision réelle et effective de faire converger deux chemins en un unique chemin » (AL 132). Pour permettre au couple de « reconnaître incompatibilités et risques » (AL 209), les équipes de préparation au mariage ont un rôle d’accompagnement et d’aide au discernement, en permettant aux fiancés de repérer leurs conditionnements qu’ils soient psychologiques ou sociaux, l’immaturité de l’un ou l’autre, la place des émotions, des passions au-delà du raisonnable (cf. AL 142-146) : tout ce qui porterait atteinte à leur liberté...

Dans Amoris Laetitia, le pape revient à plusieurs reprises sur cette caractéristique du mariage chrétien et en explique ses fondements. Il renouvelle la compréhension de l’indissolubilité vue à partir du texte d’Ephésiens (5, 21-32) et il écrit que « l’analogie entre le couple mari-femme et celui Christ-Église est une analogie imparfaite » (AL 73). L’indissolubilité est à vivre non de manière figée mais dans un processus dynamique, non comme un « joug » mais comme un « don » du Seigneur (AL 62), une capacité à aimer. L’indissolubilité est alors pour les époux une vocation, une responsabilité, la mission d’aimer comme Dieu nous aime.

Dans Amoris Laetitia, le pape incite les parents à donner la vie avec la générosité. Il rappelle que « le choix responsable de devenir parents présuppose la formation de la conscience » (AL 222). Il évoque aussi l’ouverture à la vie au sens plus large : si l’amour conjugal reflète l’amour de Dieu, cela implique une ouverture à tous, le couple est invité à faire de la place à l’autre et nous appelle à être des familles « en sortie » (AL 324).

Le Rituel Au couple qui se marie Aux équipes de préparation au mariage
Vous êtes invités à être « tous debout » (n°157). Cet appel à tous se lever invite l’assemblée à saisir la gravité de ce qui va être prononcé. Vous êtes debout devant le prêtre/diacre… et devant Dieu.
Monition
Prière


« (…) le Christ bénit abondamment votre amour conjugal (…) C’est pourquoi je vous demande maintenant d’exprimer votre intention devant l’Église. »



Suis-je conscient que mon conjoint me parle de Dieu, par l’amour qu’il me donne ? Je peux l’accueillir comme un don, une bénédiction de Dieu.



Pourrions-nous énumérer les « bénédictions » que nous avons reçues de Dieu ?
La première formule s’adresse aux futurs époux : « vous avez écouté la parole de Dieu qui révèle la grandeur de l’amour humain et du mariage ». Cette formule indique le sens du mariage chrétien et dit que les textes entendus pendant la liturgie de la Parole font retentir un appel à vivre l’amour sur le modèle de celui du Christ et en coopération avec l’Esprit Saint.
Avons-nous découvert, dans les textes choisis, quelque chose qui soit spécifique au mariage chrétien ?
La deuxième formule s’adresse à l’assemblée (« avec N. et N., nous avons écouté… ») et après rappel des caractéristiques du mariage chrétien, interroge les futurs époux : « est-ce bien ainsi que vous voulez vivre le mariage ? » pour qu’ils répondent chacun séparément. Pour être valide le mariage chrétien requiert la liberté des futurs époux, un engagement d’amour fidèle et de respect pour un lien indissoluble, avec la promesse d’une fécondité : la parole donnée crée la vie par les enfants et l’ouverture vers les autres. Les témoins se placent de chaque côté des futurs époux. Même si cela ne leur est pas formellement demandé par le Rituel, on peut proposer aux futurs mariés de les associer à la préparation du mariage afin qu’ils réfléchissent aussi : quel sens donnent-ils à leur rôle de témoins ? Se sentent-ils prêts à accompagner le couple qui s’engage ? Comment envisagent-ils de le faire après le mariage ?
Le dialogue initial après rappel du fondement biblique du mariage interroge chacun sur les différents fondements de l’engagement.
Le Rituel Pour approfondir le Rituel
Tous étant debout, le prêtre invite les témoins à se placer de chaque côté des futurs époux. Puis, le prêtre ou le diacre s’adresse à eux en ces termes ou d’autres semblables (157)

Chers amis (ou N. et N.),

Vous êtes venus dans cette église

pour que le Seigneur confirme lui-même par sa grâce

votre décision de contracter le mariage,

en présence du ministre de l’Église et devant la communauté.



Le Christ bénit abondamment votre amour conjugal ;




La grâce désigne la bienveillance absolument gratuite que, de toute éternité, Dieu témoigne à l’homme en l’appelant à partager sa propre vie. « C’est l’intimité avec le Dieu de Jésus Christ donnée par le baptême et renouvelée par les sacrements. C’est par la grâce que Dieu nous sauve. » (12) Déjà Jean-Paul II dans Familiaris consortio avait dit du mariage qu’il implique « un processus dynamique qui va peu à peu de l’avant grâce à l’intégration progressive des dons de Dieu » (FC 9). Le pape François insiste sur « la grâce du sacrement de mariage destinée avant tout à perfectionner l’amour des conjoints » (AL 89 se référant au CEC n°1641). La grâce est générosité, libération, pardon … Gratuite, elle n’est pas récompense de nos mérites. Elle engendre joie et gratitude. L’accueil de cette grâce est aussi source de fécondité pour la famille.(13)

Les accompagnateurs pourront dire comment ils perçoivent la grâce à l’œuvre dans leur vie conjugale, par le témoignage de situations concrètes.
Pour aider les époux
À se garder toujours fidèles l’un à l’autre,
Et à porter ensemble toutes les responsabilités du mariage,
Fidèle : La fidélité vous fait-elle peur ? Pourquoi ? Qu’est-ce qui vous aide à faire vivre la fidélité (mots, gestes, attentions qui font grandir, ressourcent notre amour) ? Quel est le rôle de la volonté ?
Il enrichit et fortifie d’un sacrement spécial Sacrement : le sacrement de mariage fait de l’engagement d’un homme et d’une femme un signe de l’engagement de Dieu qui appelle l’homme à vivre de son Amour.
Ceux qu’il a déjà consacrés par le baptême.

C’est pourquoi je vous demande maintenant d’exprimer votre intention devant l’Église.
Baptême : si l’un des futurs époux n’est pas baptisé, l’Église respecte profondément sa situation. Pour le mariage entre une partie catholique et une partie catéchumène ou non chrétienne, les caractères gras ci-contre sont remplacés par la formule suivante : « ainsi votre amour sera enrichi de sa bénédiction, il en sera fortifié pour vous aider à demeurer fidèles l’un à l’autre et à porter ensemble toutes les responsabilités du mariage. » (n°203)

Les accompagnateurs pourront expliquer comment le fait d’être baptisé éclaire le sens de leur mariage, et comment leur mariage fait évoluer leur vie de chrétiens.
Ce que dit le rituel (PREMIÈRE FORMULE) Pour approfondir le Rituel
Alors le prêtre ou le diacre interroge les futurs époux au sujet de la liberté, de la fidélité, de l’accueil et de l’éducation des enfants. Chacun répond séparément. (158)

N. et N., vous avez écouté la parole de Dieu Qui révèle la grandeur de l’amour humain et du mariage.

Vous allez vous engager l’un envers l’autre.
Les questions du dialogue initial sont denses : elles expriment de manière synthétique l’engagement mûri, réfléchi, à vivre le mariage tel que l’Église le propose.

Ces questions doivent être posées et travaillées en amont, au cours de la préparation, d’une manière plus développée et plus concrète. Pour réfléchir à la liberté, fidélité, indissolubilité et fécondité en lien avec la parole de Dieu on pourra aussi se reporter à la Fiche 2.
Est-ce librement et sans contrainte ?











Les futurs époux (séparément) : Oui
Librement
Vous sentez-vous libre par rapport à l’autre ? Vous arrive-t-il de dire « non » à votre conjoint, même au risque de déplaire ? Est-ce que vous vous sentez libre dans vos finances, relations, choix professionnels, loisirs ? Est-ce que vous pensez respecter la liberté de l’autre, ses priorités, ses rythmes, son jardin secret ? Est-ce que vous vous sentez respecté(e) sur ces points ? Est-ce que vous vous sentez libre après un temps de cohabitation plus ou moins long ? Vous sentez-vous libre de toute pression sociale, familiale (vis-à-vis de votre famille, de votre belle-famille) ? Avez-vous le souvenir d’un moment précis où vous vous êtes choisis et engagés l’un vis à vis de l’autre ? Comment ajustez-vous la liberté de votre couple vis à vis des amis, de la vie professionnelle, des loisirs ? Avez-vous toujours le souci d’une parole vraie tant dans vos conflits que dans l’apparence d’accord qu’il y a quelquefois entre vous ?

« Le mariage est une question d’amour, seuls peuvent se marier ceux qui se choisissent librement et qui s’aiment. Toutefois, lorsque l’amour devient une pure attraction ou un sentiment vague, les conjoints souffrent d’une très grande fragilité (…), il s’avère indispensable d’accompagner les premières années de la vie matrimoniale pour enrichir et approfondir la décision consciente et libre de s’appartenir et de s’aimer jusqu’à la fin. » (AL 217)
En vous engageant dans la voie du mariage vous vous promettez amour mutuel et respect. Est-ce pour toute votre vie ?









Les futurs époux (séparément) : Oui
Amour mutuel et respect.
Pourquoi ne pas aborder les aspects plus délicats de la vie conjugale : les blessures infligées à l’autre lors de conflits, les moments où on ne s’est pas senti respecté(e). Comment abordez-vous les sujets sur lesquels vous savez que vous n’êtes pas d’accord ? Comment vous réconciliez-vous ? Avez-vous l’expérience d’avoir déjà demandé pardon à l’autre ? Comment réagiriez-vous si vous appreniez que votre conjoint vous trompe ? « Chaque crise est comme un nouveau oui qui permet à l’amour de renaître fortifié, transfiguré, mûri, illuminé. » (AL 238) « Savoir pardonner et se sentir pardonné constitue une expérience fondamentale dans la vie familiale. » (AL 236)

Toute votre vie
Comment êtes-vous attentif à l’autre ? à son devenir ? Acceptez-vous de voir évoluer vos attentes ? celles de votre conjoint ? La gestion des désaccords et le pardon peuvent permettre d’avancer ensemble. De quelles ressources estimez-vous disposer pour vivre ensemble toute votre vie ? Quels moyens prenez-vous pour faire grandir votre amour et lutter contre la routine ?

« Un défi de la pastorale matrimoniale est d’aider à découvrir que le mariage ne peut se concevoir comme quelque chose d’achevé (…) Le regard se dirige vers l’avenir qu’il faut construire quotidiennement, avec la grâce de Dieu » (AL 218) Le mariage, « un projet à construire ensemble avec patience, compréhension, tolérance et générosité (…) il faut montrer cela aux jeunes couples avec une clarté réaliste dès le départ, en sorte qu’ils prennent conscience du fait qu’ ‘’ils sont en train de commencer’’ » (AL 218)
Si les futurs époux sont avancés en âge on omettra ce qui est entre [].

[Êtes-vous prêts à accueillir les enfants que Dieu vous donne et à les éduquer selon l’Évangile du Christ et dans la foi de l’Église ?]

Les futurs époux (séparément) : Oui
Accueillir les enfants
Avoir un enfant, espérance ou crainte pour l’avenir ? Avez-vous dialogué sur les enfants que vous souhaitez, l’éducation (humaine, spirituelle, baptême, catéchisme etc.) que vous souhaiteriez leur donner, leur nombre … Et s’ils ne venaient pas ? Ou si l’enfant était différent, handicapé ? Comment envisagez-vous d’équilibrer le temps pour votre couple en ayant des enfants ? Quelle ouverture aux autres souhaitez-vous vivre dans votre couple ? (On peut lire AL 222).
Éduquer selon l’Évangile du Christ
Pour vous, qui est le Christ ? Quelle place a-t-il dans votre vie ? Vous souvenez-vous d’un épisode de la vie du Christ ? Avez-vous parlé ensemble de ce en quoi vous croyez chacun personnellement ? La foi chrétienne inspire-t-elle votre manière d’envisager l’éducation des enfants ? En quoi ? Qu’est-ce qui caractérise pour vous une éducation chrétienne ? Quels principes ? Quelles valeurs ?
Si cela convient, le prêtre ou le diacre peut ajouter, en ces termes ou en d’autres semblables :

Êtes-vous prêts à assumer votre mission de chrétiens dans le monde et dans l’Église ?

Les futurs époux (ensemble) : Oui
Mission
Connaissez-vous des gens qui se disent chrétiens ou que vous savez l’être ? Pourriez-vous citer des figures chrétiennes (abbé Pierre, mère Teresa, le pape François etc.). Qu’est-ce qui caractérise à vos yeux ces figures comme chrétiennes ? Quelle est selon vous la mission des chrétiens dans la société ? dans l’Église ? Comment voyez-vous votre place dans l’Église ? Votre mission ? En quoi cet appel vous déplace-t-il ? Qu’est-ce qui y fait obstacle ?
Le Rituel ne sépare pas beaucoup l’engagement au mariage de la foi comme le montrent les deux dernières questions.
Ce que dit le rituel (DEUXIÈME FORMULE) Pour approfondir le Rituel
Le prêtre ou le diacre s’adresse à l’assemblée :
« Avec N. et N., nous avons écouté la parole de Dieu qui révèle la grandeur de l’amour humain et du mariage. »

Puis il interroge les futurs époux au sujet de la liberté, de la fidélité et de l’accueil et de l’éducation des enfants. Chacun répond séparément. Il poursuit : « Le mariage suppose que les époux s’engagent l’un envers l’autre librement et sans contrainte, qu’ils se promettent amour mutuel et respect pour toute leur vie [qu’ils accueillent les enfants que Dieu leur donne et les éduquent selon l’Évangile du Christ et dans la foi de l’Église. » N. et N. est-ce bien ainsi que vous voulez vivre dans le mariage ? Les futurs époux (séparément) : Oui

Êtes-vous prêts à assumer votre mission de chrétiens dans le monde et dans l’Église ? Les futurs époux (ensemble) : Oui




Cette deuxième forme est moins courante.

Le pape François demande d’accompagner la préparation au mariage : « Nous avons besoin d’aider les jeunes à découvrir la valeur et la richesse du mariage. Ceux-ci doivent pouvoir percevoir l’attrait d’une union plénière qui élève et perfectionne la dimension sociale de l’existence, donne à la sexualité son sens entier et qui en même temps promeut le bien des enfants et leur offre le meilleur environnement possible pour leur maturation ainsi que pour leur éducation. » (AL 205)

En amenant le couple à préciser ce que chacun entend par liberté, fidélité, indissolubilité et fécondité, la première mission des équipes de préparation au mariage est de l’aider dans son discernement. En outre, si un problème semble compromettre le mariage, il faut alors en référer à la personne en charge du dossier administratif.

Ce travail de questionnement et de réflexion peut conduire certains à désirer recevoir le pardon de Dieu par le sacrement de pénitence et de réconciliation, signe de l’amour infini de Dieu. « Le pardon n’est pas le fruit de nos efforts, mais c’est un cadeau, un don de l’Esprit-Saint, qui nous comble dans le bain régénérant de miséricorde et de grâce qui coule sans cesse du cœur grand ouvert du Christ crucifié et ressuscité. C’est seulement si nous nous laissons réconcilier dans le Seigneur Jésus avec le Père et avec nos frères que nous pouvons être vraiment dans la paix.» (Pape François, audience générale, 19 février 2014)

La réflexion peut amener le couple à se rendre compte qu’il est trop éloigné de la foi de l’Église pour s’engager en conscience, et différer son engagement. On veillera à accompagner cette décision avec respect, et à proposer - si c’est opportun - un accompagnement spécifique, ou des lieux d’approfondissement de la foi chrétienne.

Quelques questions...

  • En lisant les questions du dialogue initial, à quels moments concrets de votre vie conjugale et familiale avez-vous pensé ?
  • Comment la foi chrétienne permet-elle de comprendre les valeurs de liberté ? d’indissolubilité ? de fidélité ? de fécondité ?
  • Comment le Rituel peut-il interroger ou compléter votre manière d’aborder les « quatre piliers » du mariage chrétien avec les fiancés ?